UTMB 2017: UN « FABULEUX COMBAT D’HOMMES »

Le plateau de départ annonçait d’emblée la couleur. Jamais l’UTMB n’avait entraîné autant de ferveur. Le duel entre François D’haene et Kilian Jornet était annoncé. Il a bien eu lieu. De la victoire du «géant», qui n’a jamais aussi bien porté son nom, au premier sacre sur l’épreuve de la catalane Nuria Picas, en passant par l’abandon de Caroline Chaverot ou au retour improbable de Jim Walmsley, l’UTMB a cette année déchaîné les passions. Inévitablement, cette course restera dans les annales. Malgré la météo qui a rendu la course très difficile, le public était au rendez-vous. Retour sur ce week-end exceptionnel.

Si l’on devait ne retenir qu’un nom de ce week-end, ce serait le sien. Déjà lauréat de l’épreuve en 2012 et 2014, François D’Haene a montré qu’il était bien le patron de l’Ultra-trail en ajoutant à son palmarès un troisième succès sur cette épreuve. Vainqueur notamment de la Salomon Gore Tex Maxi-Race (113km, 7100m D+) et du Madeira Island Ultra Trail (112km, 7050m D+) cette année, le pensionnaire du Team Salomon a livré une course d’anthologie. Après avoir passé la nuit avec Kilian Jornet et Jim Walmsley, le vigneron a fait basculer la course à la Fouly. Toujours à l’attaque, François D’Haene a pris la course à son compte et n’a pas attendu de «ramasser les morts». Dans une course maîtrisée de bout en bout, il a fait sauter un par un ses adversaires et a résisté au retour de Kilian Jornet. Une victoire qui ne souffre d’aucune contestation et qui en fait aujourd’hui le numéro 1 incontesté de la discipline. Mais au delà de cette victoire, au delà du fait que François D’Haene gagne quasiment tout en Ultra-trail, ce qu’on retiendra c’est sa simplicité, son humilité. Ses propos tenus sur la ligne d’arrivée, dans lesquels il a tenu à remercier en premier lieu les personnes qui l’assistent au quotidien, n’ont fait qu’exacerber ce trait de caractère. S’il n’avait plus rien à prouver, François D’Haene a confirmé ce week-end qu’il était un athlète d’exception.

 

« Un fabuleux combat d’hommes »

Quand on parle d’athlète d’exception, on ne peut omettre de parler de Kilian Jornet. Trois fois vainqueur de l’épreuve, l’espagnol a cette fois dû se contenter de la deuxième place. Si ce résultat n’est pas celui qu’il était venu chercher, l’espagnol n’a pas de regrets à avoir. Compétiteur dans l’âme, il s’est battu avec panache et courage, mais est tout simplement tombé sur plus fort que lui. Coureur le plus polyvalent au monde, Jornet a choisi de participer à l’UTMB au vu du plateau annoncé afin de se frotter aux meilleurs coureurs mondiaux. Il a ainsi pris le risque de se faire battre, chose extrêmement rare. Au terme de ce «fabuleux combat d’hommes» (selon les mots de Jean-Michel Faure Vincent, manager du team salomon), l’espagnol n’a pu que s’incliner face à son ami François D’Haene. Si Kilian Jornet répond toujours présent sur n’importe quel format de course, cet UTMB aura eu pour mérite de mettre en avant une chose trop souvent négligée par les observateurs: un 80 ou un 100km n’est pas un Ultra-trail. Et aujourd’hui, le maître de cette discipline est bien François D’Haene.

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D’Haene et Jornet (Photo: Martina Valmassoi)

Peu médiatisé en France, Tim Tollefson a une nouvelle fois répondu présent. 2ème de la CCC en 2015 et 3ème de l’UTMB l’an dernier, le pensionnaire du Team Hoka est parvenu à rééditer sa performance de 2016 dans un contexte pourtant extrêmement relevé. Longtemps en embuscade, l’américain a su sortir du bois au bon moment pour monter sur la troisième marche du podium.

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Jornet, D’Haene et Tollefson (Photo: UTMB)

 

Thévenard répond présent, Walmsley apprend encore

Après ses victoires en 2013 et 2015, Xavier Thévenard faisait office de candidat sérieux au podium (lire ICI). Vainqueur du 80km du mont-blanc cette année, il aura manqué peu de chose au coureur du team Asics pour revenir sur Tim Tollefson. Après avoir marqué le pas dans la montée vers le refuge du col du Bonhomme, il réalise une fin de course remarquable mais malheureusement pour lui insuffisante pour monter sur la boîte.

Au regard du résultat brut, la cinquième place de Jim Walmsley pourrait être considérée comme un échec. Finalement, avec du recul, celle-ci est prometteuse pour l’avenir. Annoncé comme le principal rival de François D’Haene et de Kilian Jornet, l’américain a une nouvelle fois explosé en plein vol, malgré une gestion de course plus prudente qu’à l’accoutumée. Offensif comme à son habitude, Jim Walmsley a tenté de tempérer ses ardeurs. Attendre Kilian Jornet au ravitaillement en début de course montre bien qu’il a tiré les leçons du passé, et notamment de son abandon au 78ème kilomètre de la Western State 2017 après être parti comme un boulet de canon. Après une descente du Grand col Ferret très difficile dans laquelle il a vu partir le vainqueur du jour, Jim Walmsley a été contraint de s’arrêter près d’un quart d’heure à la Fouly. Très marqué à ce moment de la course, l’abandon semblait alors tout proche. Il n’en fût rien. En repartant et en finissant la course de la manière dont il l’a fait, en acceptant de perdre des places au classement pour récupérer, il a démontré une force mentale des plus remarquables. Cela est très prometteur pour la suite quand on sait l’importance du mental en Ultra-trail. Si pour le moment du haut de ses 27 ans il ne parvient pas à s’imposer comme il le souhaiterait dans cette discipline, nul doute que ce n’est qu’une question de temps.

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Jim Walmsley

 

Nuria Picas brise le signe indien

Chez les féminines, Nuria Picas est enfin parvenue à remporter un titre qui lui tenait à cœur. Après plusieurs désillusions et deux deuxièmes places sur cette épreuve (en 2013 et 2014), la catalane a livré une course pleine. En prenant rapidement les commandes et en creusant le trou de manière assez conséquente, on pensait que la victoire serait acquise assez aisément. La montée vers la Flégère se révélera toutefois plus compliquée que prévu. Victime d’une crise d’asthme, l’espagnole voyait son avance accumulée pendant 150km fondre comme neige au soleil. Au courage, Nuria Picas a toutefois trouvé les ressources pour rallier la ligne d’arrivée en tête, devançant de quelques minutes Andrea Huser. Spécialiste des courses d’Ultra, cette dernière répond toujours présent. Exemple de régularité au plus haut niveau, elle avouera qu’elle aurait aimé aller chercher la lauréate du jour dans la dernière descente et «finir main dans la main».

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Nuria Picas et Andrea Huser (Photo: UTMB)

 

Si ces deux coureuses sont désormais bien connues du grand public, ce n’était pas le cas de Christelle Bard avant la course. Celle-ci signe la grosse surprise du jour en s’emparant de la troisième place. Vainqueur de l’Ultra-trail de Tenerife (97km, 5850m D+) en Juin et de la Skyrace de Montgenèvre en juillet, la française est pourtant habituée à jouer les premiers rôles à Chamonix. 4ème de la CCC en 2015 et 3ème de la TDS (119km, 7340m D+) en 2016, elle s’inscrit comme une athlète à suivre de près à l’avenir.

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Huser, Picas et Bard (Photo: UTMB)

A l’inverse de sa compatriote citée ci-dessus, Caroline Chaverot ne sera pas montée sur le podium cette année. Vainqueur l’an passé, la française faisait office de favorite logique à sa propre succession. Habituée à contrôler les courses sur lesquelles elle s’aligne, elle a cette fois vu Nuria Picas prendre le large dès le début. Si on la pensait capable de revenir sur la catalane, Caroline Chaverot a mis le clignotant au bout de 12 heures de combat contre elle-même. Victime de problèmes de santé la contraignant à jeter l’éponge, cet abandon est une grosse désillusion pour la championne du monde 2016 qui espérait beaucoup de ce week-end.

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Caroline Chaverot (Photo: Damien Rosso, Droz photos)

Cette édition 2017 aura donc tenu toutes ses promesses. Face à une concurrence extrêmement relevée, François D’Haene a prouvé à ceux qui en doutaient encore qu’il était bien le meilleur coureur d’Ultra-trail du moment. Nuria Picas a quand à elle vaincu le signe indien en signant sa première victoire sur l’épreuve et en faisant étalage de tout son talent et de son abnégation. Seront-ils là en 2018 pour défendre leur couronne? Réponse l’année prochaine.

Hugo PELLETIER


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